« Qui contrôle qui ici ? » C’est la question qu’un employé d’un groupe informatique international s’est posée lorsque son employeur a mis en place un système de surveillance du temps de travail basé sur l’IA. Officiellement, il s’agissait d’améliorer l’efficacité. Mais l’équipe a rapidement eu l’impression d’être surveillée. La détection de mouvement, les frappes au clavier, même le temps passé en réunion, tout était mesuré. L’entreprise parlait de transparence, les employés de méfiance. Où se situe la frontière entre optimisation et contrôle ? Cet article donne un aperçu de la question.
Entre efficacité et contrôle : l’analyse du temps de travail assistée par l’IA
Dans le monde du travail moderne, la façon dont le temps de travail est enregistré et analysé a fondamentalement changé. Les méthodes traditionnelles telles que le « pointeuse » classique cèdent de plus en plus la place à des systèmes avancés assistés par l’IA. Ces technologies permettent aux entreprises d’obtenir des informations détaillées sur la productivité de leurs employés en analysant non seulement les heures de présence, mais aussi l’utilisation de programmes spécifiques, la durée des réunions et la fréquence des activités par e-mail. L’objectif principal est d’identifier les modèles de productivité et d’optimiser les processus de travail.
De tels systèmes gagnent en importance, en particulier à l’heure des modèles de travail hybrides, où les employés travaillent à la fois au bureau et à domicile. La suivi du temps en télétravail pose aux entreprises le défi de garantir l’efficacité du temps de travail d’une part, et de préserver la protection des données et la confiance des employés d’autre part. Certaines entreprises s’appuient sur des analyses détaillées, tandis que d’autres se contentent de mesurer les temps de présence afin de laisser plus de liberté à leurs employés.
Ce que l’IA analyse vraiment
Les entreprises utilisent de plus en plus de systèmes basés sur l’IA pour analyser la productivité de leurs employés. Alors que certaines solutions visent à optimiser les processus de travail, d’autres vont beaucoup plus loin et enregistrent des données comportementales complètes. La technologie utilisée par Uber pour surveiller ses chauffeurs en est un exemple. Non seulement les temps de conduite sont enregistrés, mais le comportement au volant, les pauses et même la reconnaissance faciale sont également utilisés. De telles méthodes soulèvent de sérieuses questions en matière de protection de la vie privée, en particulier lorsque les employés n’ont aucune influence sur les données qui sont stockées et évaluées.
Optimisation basée sur les données ou surveillance numérique ?
Les entreprises s’appuient de plus en plus sur des analyses basées sur l’IA pour identifier les processus inefficaces. Les données montrent quand les employés sont particulièrement productifs ou quelles tâches prennent trop de temps. Les grandes entreprises, en particulier, qui ont des équipes dispersées, utilisent de tels outils pour enregistrer les indicateurs de performance de manière plus objective.
Cependant, toutes les mesures ne sont pas bien accueillies. Dans certains cas, des employés ont même porté plainte contre des systèmes de surveillance. En France, un tribunal a interdit à une entreprise d’utiliser un logiciel qui enregistrait toutes les frappes au clavier, au motif qu’une telle intrusion portait atteinte à la vie privée des employés.
Comment les entreprises peuvent utiliser l’IA de manière judicieuse
Certaines entreprises combinent l’automatisation et la responsabilité individuelle en analysant les processus de travail dans leur ensemble au lieu de surveiller chaque employé individuellement. L’accent est mis sur l’identification des processus qui prennent inutilement du temps, sans suivre chaque clic.
Prenons l’exemple d’une entreprise qui a constaté que les réunions hebdomadaires occupaient 30 % du temps de travail. Grâce à des analyses basées sur l’IA, il a été possible de réduire le nombre de réunions inefficaces sans que les employés aient le sentiment d’être constamment surveillés. De telles optimisations soulagent non seulement la direction, mais aussi le personnel.
La transparence, clé de l’acceptation
Un point critique demeure : Les employés doivent avoir leur mot à dire. Lorsque les entreprises divulguent quelles données sont collectées et pourquoi, l’acceptation augmente. En l’absence de cette transparence, le sentiment de surveillance constante peut nuire au moral et à la productivité.
En France, par exemple, Amazon France Logistique a été condamnée à une amende de 32 millions d’euros par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) pour avoir excessivement surveillé ses employés.
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