Yoel Tordjman, fondateur et CEO de DataScientest nous présente son avis sur l’émergence de l’IA et les défis auxquels cette nouvelle technologie va faire face.
Présentation de DataScientest
DataScientest est un acteur majeur de la formation Tech en Europe. Elle propose des programmes de formations spécialisés dans la data, la cybersécurité, le cloud et le développement informatique. L’entreprise met en place des formations adaptées aux besoins de grandes organisations ainsi qu’aux personnes en reconversion professionnelle.
Quels sont les défis auxquels les entreprises souhaitant adopter l’IA innovante font face ?
L’adoption de l’IA est soumise à deux défis majeurs. Le premier concerne la rentabilité des projets IA. Les entreprises peinent encore à démontrer un retour sur investissement clair. Cela vaut aussi bien en matière de réduction des coûts ou de croissance du chiffre d’affaires. Cette difficulté freine l’allocation de ressources supplémentaires et limite l’extension des projets IA au sein des organisations.
Le second défi est d’ordre technologique et réglementaire. La collecte et l’utilisation de données de qualité sont entravées par des contraintes strictes, notamment éthiques et légales. Elles sont surtout imposées par des régulations comme l’IA Act. De plus, la mise en production de ces outils IA reste complexe. Cela nécessite souvent des ressources externes coûteuses.
Ces deux défis sont étroitement liés. Sans preuves de rentabilité, il est difficile de débloquer les budgets nécessaires pour surmonter les obstacles technologiques et déployer l’IA à grande échelle dans les entreprises.
Comment la formation peut aider à franchir ces obstacles ?
Pour encourager une adoption efficace de l’IA, DataScientest propose des formations adaptées aux profils techniques et aux métiers opérationnels. Ces programmes vont au-delà des simples outils grand public. Ils ciblent à la fois les experts responsables de développer et sécuriser des solutions IA internes, ainsi que les professionnels des ressources humaines, du marketing ou de la finance. En intégrant des parcours sur-mesure au sein d’académies d’entreprise, DataScientest favorise une intégration pertinente et ciblée de l’IA en fonction du contexte de chaque organisation.
Ces formations montrent aux collaborateurs comment l’IA peut générer des gains mesurables. En formant différents départements à identifier des cas d’usage concrets, l’entreprise est en mesure d’aligner les projets IA sur les objectifs business. Il est ainsi plus simple d’évaluer le retour sur investissement de ces technologies.
Par ailleurs, les programmes permettent aux équipes techniques de maîtriser les contraintes réglementaires, notamment celles posées par l’IA Act. Ils assurent aussi une gestion sécurisée des données internes. Cette double approche permet aux entreprises de surmonter les obstacles liés à la mise en production de l’IA, en maximisant à la fois l’innovation et la conformité.
Quels sont les impacts potentiels de l’IA Act et les perspectives qu’elle offre pour les entreprises innovantes ?
L’IA Act, prévu pour 2026, cherche à encadrer l’utilisation de l’intelligence artificielle tout en stimulant son développement en Europe. Cependant, la méthodologie nous met face à un paradoxe. Bien que ce cadre pose des bases solides en matière de régulation, l’absence d’un organe de contrôle équivalent à la CNIL pour le RGPD soulève des inquiétudes.
Des sanctions sont prévues en cas d’abus, telles que des amendes allant jusqu’à 30 millions d’euros ou 7 % du chiffre d’affaires. Cependant, l’absence de régulateur pourrait favoriser des dérives avant l’entrée en vigueur effective de la réglementation.
Pour les entreprises, ce délai de mise en conformité est une opportunité d’expérimentation sans contrainte immédiate. Cependant, il comporte aussi des risques. Sans supervision stricte, certaines organisations pourraient contourner les règles ou retarder leur mise à niveau.
L’IA Act représente donc à la fois un défi réglementaire et une chance de croissance, en offrant un cadre structuré pour un développement responsable de l’IA tout en laissant le temps aux entreprises de s’adapter.
Pouvez-vous nous éclairer sur la guerre des talents qui se déroule dans le monde de la Tech et de la Data ?
La guerre des talents dans le secteur de l’IA se déroule à deux niveaux. D’un côté, les entreprises qui produisent des technologies d’IA, comme Mistral ou Kyutai en France, se disputent les experts les plus expérimentés. Ils leur offrent souvent des salaires astronomiques. Ces talents, ayant participé à la conception de modèles avancés comme les LLM, sont particulièrement recherchés et bénéficient d’avantages financiers importants, y compris des stock-options.
De l’autre côté, les entreprises consommatrices d’IA, qui ne développent pas directement ces technologies, mais les exploitent, rencontrent également des tensions dans le recrutement. Elles cherchent des profils capables de personnaliser et d’implémenter des LLM adaptés à leurs besoins. Ces experts doivent gérer les défis liés à la mise en production et à la maintenance des modèles IA dans un environnement professionnel, un savoir-faire encore rare.
Cette dynamique ouvre des opportunités pour certains métiers, notamment celui de data scientist, qui connaît un regain d’attractivité. Avec l’essor des projets IA, ces professionnels deviennent essentiels pour adapter et exploiter efficacement les technologies disponibles, faisant grimper leur valeur sur le marché du travail.
Enfin, pouvez-vous nous donner votre opinion sur l’avenir du SEO et des médias face à l’IA ?
L’émergence de l’IA suscite certaines craintes chez Google, notamment face à un éventuel changement des habitudes de consommation. Cette inquiétude réside dans le fait que les utilisateurs pourraient abandonner les moteurs de recherche traditionnels au profit d’outils IA comme les modèles GPT. Cela réduirait ainsi le trafic vers Google. Cette situation rappelle le précédent d’Amazon, où j’ai évolué par le passé. En effet, de nombreux consommateurs ont pris l’habitude de faire leurs recherches directement sur la plateforme de vente plutôt que sur Google.
Par ailleurs, une autre crainte concerne l’apparition de médias générant massivement du contenu avec des LLM pour établir rapidement une autorité en ligne. Google est toutefois capable de détecter ce type de contenu automatisé et ajuste ses algorithmes en conséquence pour préserver la pertinence de son indexation. Le risque que des articles produits à 100 % par IA envahissent le web reste donc limité.
Malgré cette évolution, le rôle des journalistes humains reste prépondérant. Bien que l’IA puisse assister dans la production de contenu, la valeur ajoutée des journalistes réside dans leur capacité à structurer, vérifier et enrichir l’information. Ils apportent également une fraîcheur et une pertinence contextuelle qui ne peuvent être entièrement automatisées, assurant ainsi un contenu fiable et de qualité.
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