L’arrêt brutal du financement américain de la lutte contre le VIH a déjà des répercussions dramatiques. Chaque jour, environ 1400 nourrissons contracteraient le virus en raison de ces coupes budgétaires.
Le 20 janvier, le président Donald Trump a suspendu les financements des programmes de santé mondiale. Quatre jours plus tard, le secrétaire d’État Marco Rubio a ordonné un gel des aides étrangères. Ces décisions ont provoqué une crise immédiate pour les organisations dépendantes de ces fonds.
Une enquête menée par l’amfAR, la Fondation pour la recherche sur le sida, a révélé qu’en février, plus d’un tiers des structures bénéficiaires avaient déjà cessé leurs activités. Le problème ne se limite pas à la lutte contre le VIH. L’arrêt des financements prive aussi des milliers de femmes d’un accès au dépistage du cancer du col de l’utérus et à des services de soutien face aux violences sexistes.
Face à la situation, Rubio a annoncé une dérogation temporaire le 28 janvier pour certains services humanitaires. Le 1er février, le Plan d’urgence du président pour la lutte contre le sida (PEPFAR) a reçu une autorisation spéciale. Malgré ces ajustements, la reprise des activités reste limitée.
Jennifer Sherwood, directrice de la recherche à l’amfAR, explique que même les fonds déjà alloués aux structures ont été gelés. « Nous sommes en crise, et les conséquences sont immédiates », a-t-elle déclaré lors d’une conférence à l’université Columbia.
Des structures en difficulté et un personnel licencié
Pour évaluer l’impact global, l’amfAR a interrogé 150 organisations réparties dans 26 pays. Les résultats révèlent des dysfonctionnements alarmants :
- 90 % des répondants signalent une forte réduction des services de prévention et de traitement du VIH.
- 94 % des suivis médicaux ont été annulés.
- 92 % des services liés aux violences sexistes ne fonctionnent plus.
La situation financière de ces structures se détériore rapidement. Deux tiers des organisations ont déjà licencié une partie de leur personnel. Parmi elles, 36 % ont complètement cessé leurs activités avant la fin du mois de janvier.
Les centres qui accueillaient des dizaines de milliers de malades ne sont plus opérationnels. Certains suivaient plus de 100 000 patients, aujourd’hui livrés à eux-mêmes.
Jennifer Sherwood évoque aussi un problème de pénurie de médicaments. Avant l’arrêt des financements, les patients recevaient un stock de six mois. Aujourd’hui, beaucoup ne disposent que d’un mois de traitement, ce qui les expose à de graves risques sanitaires.
Un impact dramatique sur les femmes et les enfants
Les populations les plus vulnérables subissent de plein fouet ces décisions. Chaque jour, 7 000 femmes ne peuvent plus bénéficier d’un dépistage du cancer du col de l’utérus. Les enfants et adolescents se retrouvent également en danger, car l’absence de soins peut avoir des effets irréversibles sur leur développement.
Farah Arabe, membre du Réseau mondial d’action pour la santé mentale, alerte sur les dangers d’une telle interruption. « Les jeunes en pleine croissance subissent des conséquences durables lorsqu’ils sont privés de soins essentiels », explique-t-elle.
Des perspectives incertaines
Le 10 mars, Rubio a annoncé que 83 % des programmes financés par l’USAID allaient être définitivement supprimés. Cette décision accentue une crise déjà préoccupante. Face à l’urgence, les organisations humanitaires recherchent de nouveaux financements indépendants des États-Unis. Toutefois, le défi reste immense.
« Si aucune action rapide n’est mise en place, nous risquons de perdre des années de progrès sur la lutte contre le VIH et d’autres maladies », prévient Thoai Ngo, chercheur en santé publique à l’université Columbia. Les prochains mois s’annoncent décisifs. Sans solution rapide, ces coupes budgétaires pourraient avoir des conséquences dramatiques pour des millions de personnes.
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