Les pilotes européens s’inquiètent vivement des projets d’automatisation croissante dans l’aviation commerciale. Ils craignent en particulier la réduction des équipages et le passage à un pilotage en solo, que l‘ECA qualifie de « pari dangereux ».
Le Syndicat des Pilotes de Lignes Européens (ECA) a exprimé ses préoccupations face aux plans d’automatisation des vols commerciaux. Les constructeurs d’avions souhaitent introduire des logiciels capables de soutenir un nouveau modèle appelé « opérations de minimum d’équipage étendu » (eMCO). Ce concept vise à retirer un pilote du cockpit pendant la phase de croisière de l’avion. Cela permettrait à la technologie automatisée de prendre en charge les tâches de soutien habituellement effectuées par un pilote.
Airbus, le géant de l’aéronautique, est l’un des fervents défenseurs de ce changement. L’entreprise affirme que cette évolution pourrait réduire la fatigue des équipages et augmenter les efficacités, tout en diminuant les coûts de personnel. Cependant, pour les pilotes, cette initiative est perçue comme une « stratégie axée sur le profit » qui présente un « risque significatif pour la sécurité ».
La perspective de l’EASA
L’Agence de la Sécurité Aérienne de l’Union Européenne (EASA) évalue actuellement ces propositions. Si elles sont approuvées, les avions commerciaux pourraient ne plus nécessiter la présence de deux pilotes dans le cockpit.
Selon le président de l’ECA, le capitaine Otjan de Bruijn, c’est la première fois que l’EASA entame un processus de réglementation sans l’intention de résoudre un problème de sécurité existant. Il souligne que la sécurité de chaque vol repose sur la présence de deux pilotes bien formés et bien reposés.
L’automatisation au cœur du débat
Airbus et Dassault, deux entreprises françaises, sont à la pointe de ce projet d’automatisation. Airbus développe l’eMCO spécifiquement pour l’avion A350. Selon le constructeur, ce modèle est le seul adapté à cette évolution. La sécurité à bord des avions est renforcée grâce à de nouveaux systèmes automatisés, parmi lesquels l’Auto Emergency Descent (AED) qui permet une descente d’urgence automatique.
Bien qu’Airbus ait promis de prouver l’efficacité de ces outils avant leur déploiement, les pilotes restent sceptiques et inquiets. Le capitaine de Bruijn demande des preuves claires et transparentes que ces nouvelles technologies améliorent réellement la sécurité des vols.
Les dangers potentiels de l’automatisation
Pour illustrer les risques potentiels, le capitaine de Bruijn cite les incidents du Boeing 737 MAX, un modèle cloué au sol en 2019 après deux crashes mortels attribués à des logiciels défectueux. L’avion a été remis en service, cependant, de nouveaux incidents continuent d’apparaître.
Selon une enquête, 89% des Australiens se sentiraient moins en sécurité à bord d’un vol avec un seul pilote. En France, une majorité de 60% des citoyens considère que les systèmes actuels d’automatisation offrent une couche essentielle de sécurité aux avions.
Une appel à la prudence
Le capitaine de Bruijn conclut en soulignant l’importance de ne pas sacrifier la sécurité au profit de l’efficacité ou des économies. Il demande aux régulateurs de prendre plus de temps pour évaluer les nouvelles technologies avant de les autoriser. Selon lui, il est essentiel de s’assurer que ces technologies apportent une amélioration tangible en termes de sécurité aérienne.
En fin de compte, les pilotes européens exigent que les avions ne servent pas de cobayes pour des technologies expérimentales. Ils insistent sur le fait que la sécurité des passagers doit toujours primer.
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