À 84 ans, Robert Kahn, co-créateur de l’architecture du réseau internet, reste un observateur passionné qui salue les progrès récents en intelligence artificielle, blockchain et internet des objets, tout en appelant à définir dès à présent de nouveaux standards et protocoles pour encadrer ces technologies.
À 84 printemps, Robert Kahn demeure un observateur avisé des avancées technologiques. Récemment honoré par l’IEEE, ce pionnier d’internet garde un œil sur les percées de l’intelligence artificielle, de la blockchain et des objets connectés. Mais plutôt que de se laisser emporter par l’effervescence actuelle, il prône la réflexion et la mise en place de bases solides.
Réinventer les fondations du numérique
Selon Kahn, la priorité des priorités est d’établir dès maintenant des normes et protocoles encadrant ces nouveaux terrains de jeu technologiques. Ni l’industrie, qu’il considère comme rongée par une concurrence féroce, ni les pouvoirs publics ne semblent en mesure d’imposer des standards pérennes, déplore celui qui contribua à l’avènement des célèbres protocoles TCP/IP.
C’est donc aux établissements académiques que revient cette tâche ardue mais cruciale de « réinventer les fondations du numérique« . Dotées d’une indépendance et d’une vision à long terme, les universités disposent selon Kahn des atouts nécessaires, loin des enjeux commerciaux immédiats.
Réindustrialiser et former
Autre défi de taille pour assurer le succès futur de l’industrie numérique en Occident : reconstituer un solide vivier de production de semi-conducteurs, secteur stratégique désormais dominé par l’Asie. Au-delà de la réindustrialisation, il faudra « former massivement » ingénieurs et techniciens, des profils cruciaux mais en pénurie.
Dans les années 70-80, lui et son équipe influencèrent grandement l’architecture des processeurs modernes. « Transmettre ces savoirs que nous avons accumulés sera essentiel », insiste ce patriarche du web, plutôt que de repartir de zéro.
Freiner l’innovation effrénée
Robert Kahn appelle aussi à tirer les leçons des écueils passés. Si les récents bonds en IA et blockchain l’enthousiasment, ces percées s’appuient sur des travaux pionniers souvent restés lettre morte, faute d’adoption à l’époque.
« À trop vouloir aller vite, on reproduit les mêmes travers au lieu d’approfondir la réflexion », prévient Robert Kahn. Face à l’innovation effrénée, il prône donc une « slow tech« : se donner le temps d’asseoir des assises robustes pour maîtriser les futures évolutions.
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