Le trafic de faux Pass Sanitaires représente un véritable business. À travers notre enquête complète, découvrez comment les certificats de vaccination contre le Covid sont falsifiés, revendus via les réseaux sociaux, et quels sont les risques encourus…
Depuis le mois de juillet 2021, le Pass Sanitaire est obligatoire pour accéder aux lieux de culture, de divertissement, aux restaurants et cafés, aux boîtes de nuit, ou même pour prendre le train. Il est même exigé pour certaines professions, notamment les soignants et les établissements recevant du public.
Pour obtenir ce précieux sésame, il est nécessaire d’effectuer un test PCR ou d’être vacciné contre le Covid-19. À compter de janvier 2022, le gouvernement français compte transformer le Pass Sanitaire en Pass Vaccinal. Les tests ne seront plus suffisants, et la vaccination sera donc impérative. Une » obligation vaccinale déguisée « , de l’aveu du ministre de la Santé Olivier Véran…
Toutefois, beaucoup de Français ne l’entendent pas de cette oreille. Plutôt que de se mettre au pas, ces rebelles des temps modernes préfèrent se procurer un faux Pass avec la complicité d’un soignant.
Ce phénomène prend de l’ampleur, et c’est un vaste business qui se développe sur les réseaux sociaux ou sur le Dark Web. À travers ce dossier complet, vous découvrirez comment les faux Pass sont fabriqués et distribués, par qui, à quel prix, et quels sont les risques encourus par les acheteurs et les vendeurs…
Qu’est-ce qu’un faux Pass Sanitaire ?
Un faux Pass Sanitaire ou Pass Vaccinal est une contrefaçon du certificat de vaccination Covid-19. Il est généré par une personne ayant accès au système de création de Pass, au nom de l’acheteur.
Le faux Pass permet à l’acheteur d’éviter la vaccination contre le Covid-19, tout en continuant d’accéder aux lieux soumis à la présentation du Pass. Face à la forte demande, un véritable marché se développe autour de ces documents contrefaits.
Combien de faux Pass Sanitaires circulent en France ?
En France, le ministère de l’Intérieur estimait initialement le nombre de faux Pass Sanitaire à 110 000. Selon Laurent Muller, chef du service de réanimation du CHU de Nîmes, les Français munis de faux Pass représentent entre 5% et 10% des patients en réanimation. Il précise toutefois qu’il est difficile de quantifier le phénomène, car certains patients n’avouent peut-être pas.
Le 20 décembre 2021, le ministère de l’Intérieur a finalement réévalué le nombre de faux Pass à 182 000. Cette révision à la hausse est liée à la découverte d’éléments récoltés lors des enquêtes par les forces de l’ordre. Ce chiffre ne porte que sur les cas avérés, et il est donc très probable que le nombre réel soit largement supérieur.
Hôpital de Strasbourg : 1 patient sur 10 a un faux Pass Sanitaire
Le témoignage des praticiens de l’hôpital de Strasbourg laisse entrevoir la véritable ampleur du marché des faux Pass en France. En effet, pas moins d’un patient sur dix se présenterait dans leurs services munis d’un document falsifié. C’est en tous cas ce que révèle Frédéric Leyret, directeur du groupement hospitalier Saint-Vincent.
Face à ce constat alarmant, les médecins appellent les patients à la raison et à l’honnêteté. Selon eux, les personnes qui se disent vaccinées sans l’être s’exposent à des risques inutiles de retards de prise en charge et de diagnostics.
Ils rappellent que les soignants ne sont pas là pour » faire la morale « et ont « interdiction absolue de dénoncer quoi que ce soit « . Il est donc essentiel que les patients donnent tous les éléments aux médecins pour qu’ils puissent les soigner de manière optimale.
Plus de 400 enquêtes en cours fin 2021
Début décembre 2021, Gérald Darmanin a annoncé l’ouverture de 400 enquêtes visant à démanteler les réseaux. Une centaine de personnes ont été interpellées. Les interpellations visent à la fois des usagers, et des réseaux de trafiquants.
Plusieurs services sont mobilisés pour identifier les trafics de faux Pass. L’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique travaille sur ces affaires.
Les réseaux sociaux sont surveillés par les autorités, et notamment Snapchat et Telegram. Les vendeurs et clients potentiels sont interpellés après enquête. Certaines enquêtes se concentrent sur la cybersécurité, notamment sur de nombreux piratages de comptes de médecins et de pharmaciens.
Il arrive aussi que les trafics soient révélés par hasard. Par exemple, des écoutes téléphoniques ont été menées autour de violences familiales et la police a découvert que le suspect surveillé était au coeur d’un vaste réseau avec plus de 3200 faux Pass à son actif.
Un réseau démantelé après avoir créé 10 000 faux Pass
Début décembre 2021, un réseau ayant permis de créer entre 5000 et 10 000 faux Pass Sanitaires pour un bénéfice de 2 millions d’euros a été partiellement démantelé par les autorités suite à des faits constatés à Metz.
Un couple a été placé en garde à vue, mais l’enquête se poursuit pour identifier d’autres participants. Les faussaires ont récupéré les identifiants de pharmaciens sur le site de l’Ordre national des pharmaciens, et généraient ensuite des Pass au nom des professionnels de santé en question.
L’enquête est menée par l’OCLAESP, la section de recherche et la PJ de Metz et la gendarmerie dans le cyberespace.
Comment sont fournis les faux Pass Sanitaires ?
Il existe en France plusieurs méthodes pour se procurer un faux Pass Sanitaire. Les vendeurs proposent leurs services sur les applications de messagerie instantanée et sur les réseaux sociaux, sur le Dark Web, mais aussi dans le monde réel.
Les faux Pass Sanitaires dans le monde réel
Il est possible d’obtenir un faux Pass Sanitaire sans même passer par internet. Dans les centres de vaccination, certains soignants sont prêts à simuler l’injection en échange d’un billet glissé en toute discrétion.
Dès le mois de juillet 2021, les journalistes du Parisien étaient parvenus à se procurer un faux Pass pour 300 euros. Certains médecins sont également prêts à feindre la vaccination de leurs patients…
Les faux Pass Sanitaires sur les réseaux sociaux
De nombreuses annonces circulent sur les réseaux sociaux comme Facebook, Instagram ou Snapchat. Il suffit généralement de taper » Pass Sanitaire » dans la barre de recherche pour trouver les offres.
Pour faire leur publicité, les vendeurs multiplient les annonces sur les réseaux. Certains payent même pour mettre leurs pubs en avant sur Facebook ou autre plateforme.
Pendant ce temps, les publicités sur Facebook pic.twitter.com/nlA57m0wby
— Raphael Grably (@GrablyR) December 20, 2021
Les vendeurs promettent un Pass en 24h, pour un prix généralement situé vers les 300€. On peut toutefois trouver des Pass pour seulement 50€, ou au contraire pour un prix dépassant les 1000€. Les paiements s’effectuent par cryptomonnaie comme le Bitcoin, via une appli comme Lydia, ou par recharges comme Transcash et Neosurf achetées en bar tabac.
Toutefois, face aux nombreuses arrestations, les vendeurs font preuve de méfiance. Après un premier contact sur les réseaux, les acheteurs potentiels sont redirigés vers une messagerie cryptée où la discussion peut commencer.
Quel que soit le canal, les faussaires demandent généralement les mêmes informations : le nom, la date de naissance, et le numéro de sécurité sociale de la personne intéressée. Certains demandent aussi l’adresse du client, son numéro de téléphone, et si elle a déjà eu le Covid-19.
L’acheteur n’est pas toujours obligé de payer à l’avance, et peut tester son faux Pass sur l’appli TAC ou Ameli avant. Certains vendeurs proposent même des gestes commerciaux, comme des réductions en cas d’achat groupé.
Les faux Pass sanitaires sur le Dark Web
Sur les marketplaces du Dark Web, les faux Pass Sanitaires fleurissent. Les acheteurs et les vendeurs peuvent commercer en toute impunité, grâce à l’anonymat conféré par le navigateur Tor et par les transactions en cryptomonnaies.
Une simple recherche sur le forum » Dread « suffit à trouver des pistes. Un vendeur polonais portant le surnom Netsuko propose ainsi de faux Pass allant de 480€ pour AstraZeneca et J&J à 520€ pour Pfizer ou Moderna. Les » boosters » Pfizer sont proposés pour le même prix. Ce vendeur est disponible uniquement via l’application » Session « .
Sur les différentes marketplaces du Dark Web, des vendeurs proposent aussi de faux Pass. Par exemple, sur la plateforme française Cocorico Market, on retrouve les vendeurs » Liberté Chérie » et » FrenchPass « . Tous deux proposent de faux documents pour un prix oscillant entre 300 et 350€.
Le processus est le même que sur les réseaux sociaux. L’acheteur doit fournir ses informations personnelles, et le vendeur se charge de générer le QR Code disponible en quelques jours.
Toutefois, l’avantage des marketplaces du Dark Web est le système de paiement » escrow « . Les Bitcoins utilisés pour le paiement sont stockés sur la plateforme, et l’acheteur peut valider la transaction après avoir reçu son Pass et vérifié qu’il est fonctionnel avec l’appli TousAntiCovid.
Des vendeurs de faux Pass semblent actifs sur les principales marketplaces du Dark Web. Ils sont notamment présents sur Dark0de, Versus, ou ToRReZ qui vient toutefois de fermer ses portes…
Qui fournit les faux Pass Sanitaires ?
Les QR Codes vendus de cette manière peuvent provenir de pharmacies ou de soignants piratés. Le médecin généraliste Luc Duquesnel, en Mayenne, explique avoir failli se laisser piéger par un SMS de phishing lui demandant les quatre chiffres de son identifiant. À Nantes, le code d’un infirmier nantais a été utilisé pour générer près de 54 000 codes.
Ils peuvent aussi être directement délivrés par des médecins impliqués dans le trafic. Certains professionnels de la santé profitent en effet de leur statut pour s’enrichir en vendant de faux Pass, très recherchés par les » antivaxx « . Un médecin du Val-de-Marne a été arrêté fin novembre 2021 et écroué pour avoir vendu au moins 220 faux Pass Sanitaires.
Selon Yann Bastière, délégué national investigation Unité SGP Police FO, les profils de vendeurs de faux Pass sont très variés. Il peut s’agir de médecins antivaxx, ou de personnes travaillant sur les vaccinodromes et souhaitant » arrondir leurs fins de mois « . En septembre 2021, l’Assurance maladie soupçonnait déjà 270 soignants de fraude.
Témoignage d’un ancien vendeur
Un ancien vendeur de faux Pass Sanitaire a livré son témoignage à France Info, dans un article publié le 23 décembre 2021. Âgé d’une vingtaine d’années, Yassin raconte avoir commencé son trafic » pour aider mes proches, ce n’était vraiment pas une histoire d’argent « .
En réalisant à quel point ce trafic était rentable, il s’est toutefois rapidement laissé emporter par la cupidité : « franchement si tu t’y mets à fond, en quatre mois tu peux atteindre les 100 000 euros « .
Le jeune homme raconte donc être » parti à fond » sur ce filon, estimant que c’est » moins grave » que de vendre de la drogue. Un business jugé également plus simple, puisque les clients » viennent directement à toi, grâce aux réseaux sociaux, au bouche-à-oreille « .
Comment sont fabriqués les faux Pass Sanitaires ?
Il n’est pas possible de créer un Pass Sanitaire à partir de rien. Ceci impliquerait de » hacker » le système cryptographique qui protège l’Assurance Maladie, ce qui semble impossible à l’heure actuelle.
Au moment de générer un QR Code, le professionnel de la santé doit entrer les données du patient, mais aussi une clé secrète uniquement connue de l’Assurance Maladie. Si cette clé n’est pas intégrée à la signature cryptographique du QR Code, il ne fonctionnera pas sur l’appli TousAntiCovid Verif et la fraude sera immédiatement détectée.
Un faux Pass est donc en fait un vrai QR Code, émis par un professionnel de la santé, validé par la Sécurité Sociale et adossé aux bases de données de l’Assurance Maladie. Le faussaire doit donc avoir la complicité d’un professionnel de santé, ou obtenir ses identifiants à son insu.
Pour générer le QR Code, le trafiquant doit se rendre sur la plateforme » Vaccin Covid « gérée par l’Assurance Maladie. Il doit entrer les données telles que le nom du vaccin, la date et le lieu de la vaccination. Cet outil n’est accessible qu’aux professionnels de la santé, et conditionnés à un système de double authentification transmis directement sur le smartphone du soignant par une notification.
Il est nécessaire d’avoir une carte de professionnel de la santé. La création de Pass Sanitaire repose sur le logiciel Sivac.
S’il n’a pas la complicité d’un soignant, le faussaire peut aussi s’en remettre au piratage ou à la technique du » Phishing « . Plusieurs médecins ont reçu des notifications les invitant à se connecter à » Vacin Covid » alors qu’ils ne travaillaient pas, indiquant des tentatives de connexion frauduleuses.
Certains trafiquants se sont fait passer pour des médecins auprès des autorités compétentes, en prétendant avoir perdu leurs codes de connexion et en réclamant de nouveaux. Quelle que soit la méthode employée, les faussaires cherchent par tous les moyens à accéder à la plateforme » Vaccin Covid « .
https://www.youtube.com/watch?v=PocMCLgkdpU
Quels sont les risques ?
Utiliser un faux Pass Sanitaire n’est pas sans risque. Le détenteur d’un tel document s’expose à des sanctions… mais aussi à un danger pour sa santé.
Les sanctions : amendes et peines de prison
Parmi les propriétaires de faux Pass Sanitaires, une centaine de personnes ont déjà été interpellées par les autorités à l’heure où nous écrivons ces lignes.
En guise d’exemple, on peut citer un couple de trentenaires vivant à Roubaix dans le Nord. Ils ont été interpellés et placés en garde à vue le 16 novembre 2021, et ont comparu devant la justice le 17 décembre 2021 au tribunal correctionnel de Lille.
Ils sont accusés de » fourniture et usage de faux documents administratifs « . En effet, le couple se livrait à un trafic de faux Pass sur Snapchat, et a été repéré par les gendarmes de la section de recherches de Lille dès l’été.
Les deux trentenaires proposaient leurs faux Pass sur le réseau social, pour un prix de 100 euros la pièce. Les paiements étaient effectués via un compte de paiement en ligne, et les faux Pass étaient créés via le site Ameli de l’Assurance Maladie.
On ignore pour le moment s’ils ont profité de l’aide d’un praticien de santé, ou s’ils sont parvenus à détourner ou à pirater les identifiants. Dans certains cas, le couple s’est contenté d’envoyer à ses clients de faux QR codes sur papier avec de faux noms. Une partie des clients a été escroquée et n’a rien reçu. Au total, cette manigance a rapporté environ 5000 euros aux deux Roubaisiens.
Un autre exemple est celui de l’association entre un pompier et un kinésithérapeute de Montpellier, soupçonnés d’avoir contrefait 123 faux tests négatifs et Pass Sanitaires. Ils ont été placés en garde à vue le 14 décembre 2021, puis déférés en comparution immédiate le lendemain. Leur procès est renvoyé en février 2022.
De même, un groupe de 11 personnes comprenant une aide-soignante, un étudiant, un restaurateur ou un kinésithérapeute ont écopé de peines allant du stage de citoyenneté à deux mois de prison avec sursis, et des amendes de 300 à 1000€ pour trafic de faux Pass Sanitaires.
En théorie, comme le rappelle le ministre de l’Intérieur, » utiliser, procurer ou vendre de faux Pass sanitaires est passible de 5 ans de prison et 75 000€ d’amende « . Avant l’adoption de la loi » Vigilance sanitaire « , la peine était de 3 ans de prison et 45 000€ d’amende au maximum.
De même, utiliser le certificat d’un tiers est passible d’une amende de 750 euros, réduite à 135 euros en cas de règlement rapide. Le montant atteint 1500€ en cas de récidive dans les 15 jours, puis 3750€ d’amende et 6 mois d’emprisonnement si la violation est constatée plus de trois fois en 30 jours.
Le refus de présenter son Pass peut aussi entraîner une amende de 135€. Le prix à payer monte à 1500€ en cas de récidive dans les 15 jours, ou 3750€ d’amende et 6 mois d’emprisonnement si l’infraction est constatée plus de 3 fois en 30 jours.
La désactivation du Pass
Le 20 décembre 2021, Gérald Darmanin a annoncé la découverte de 182 000 faux Pass. Toutefois, l’immense majorité de ces documents sont toujours actifs.
Pour cause, un Pass Sanitaire est un QR Code généré à partir d’une clé privée. Il est donc impossible de le révoquer à distance, sans révoquer tous les Pass basés sur la même clé. Plusieurs dizaines de milliers de QR Codes peuvent donc être impactés en cas de désactivation d’un seul faux Pass.
Ce système permet à l’origine d’éviter une trop grande concentration des données, et rend possible la lecture via un simple scan. En contrepartie, il est très compliqué de désactiver un faux Pass.
Une liste noire a néanmoins été mise en place dans les applications TousAntiCovid et TousAntiCovid-Verif. Cette liste noire comporte actuellement 3307 Pass. Ils ne sont pas annulés, mais ne peuvent plus être scannés et sont donc » inutilisables « .
La liste sera régulièrement mise à jour dans le code de TousAntiCovid, et il est possible que les 180 000 faux Pass identifiés y soient ajoutés progressivement. Même si vous vous procurez un faux Pass et qu’il fonctionne, il existe donc un risque qu’il soit » blacklisté « si la personne vous l’ayant fourni est repérée par la police.
Face au faible nombre de faux Pass révoqués, le secrétariat d’État au Numérique explique que » des travaux sont en cours pour améliorer la portée des dispositifs anti fraude « . Dans un avenir proche, un nouveau système pourrait donc être mis en place pour révoquer et désactiver plus facilement les contrefaçons…
Vers un système de » repentis » ?
Le mercredi 15 décembre 2021, en commission à l’Assemblée nationale, Oliver Véran a annoncé la mise en place d’un dispositif permettant à un » repenti » de se mettre en règle en se vaccinant. Les poursuites seront alors abandonnées.
En revanche, les médecins, kinés, infirmiers ou pharmaciens complices de trafic risquent une interdiction d’exercer leur profession. Ils encourent donc un risque majeur, même s’il reste possible pour eux de prétendre avoir été piratés…
Les dangers pour la santé
Au-delà des sanctions, le risque des faux Pass peut aussi être sanitaire. À l’origine, le Pass Vaccinal certifie que son détenteur a reçu deux ou trois doses de vaccin. Or, l’utilisateur de faux Pass prend le risque d’être potentiellement contaminé voire même de contracter une forme grave du Covid-19.
Le 10 décembre 2021, les médias ont massivement relayé le cas d’une femme de 57 ans décédée du Covid-19 à l’hôpital de Garches en région parisienne. Elle était munie d’un certificat falsifié.
Les médecins ont compris qu’elle n’était pas vaccinée en lui faisant un prélèvement pour connaître son taux d’anticorps. S’ils avaient su qu’elle n’avait pas reçu l’injection, ils auraient été en mesure de lui administrer des anticorps neutralisants afin de réduire le risque de progression de la maladie selon le Pr Djillali Annane, chef du service réanimation de l’hôpital Raymond-Poincaré.
Est-il possible de détecter un faux Pass ?
Selon Gérald Chanques, réanimateur au CHU de Montpellier, il n’est pas toujours évident de détecter un faux Pass Sanitaire. Même une prise de sang n’est pas infaillible, car » il y a des patients vaccinés qui n’ont pas d’anticorps « .
Afin de lutter contre l’usurpation de Pass Sanitaires, la police mène des contrôles renforcés dans les établissements concernés. Actuellement, les gérants d’établissements tels que les restaurateurs et propriétaires de discothèques ne sont pas en mesure de vérifier eux-mêmes l’identité du client. Le gouvernement prévoit toutefois d’ajouter le contrôle d’identité au processus à partir de janvier 2022.
Concernant les faux Pass, l’Assurance maladie coopère avec les forces de l’ordre. De nombreux outils sont utilisés pour détecter les anomalies sur la plateforme » Vaccin Covid « , et notamment l’intelligence artificielle. Par exemple, les tentatives multiples de connexion peuvent déclencher une alerte. Des vérifications peuvent alors être effectuées auprès de l’auteur du document.
L’Assurance maladie fait aussi de la prévention, en appelant les professionnels de santé à la plus grande vigilance et à ne surtout pas communiquer leur code personnel. Ils sont aussi invités à garder leur téléphone avec eux, et à ne surtout pas répondre à une demande d’authentification sur leur smartphone s’ils n’ont pas essayé d’ouvrir leurs sessions.
Peut-on annuler un faux Pass pour se faire vacciner ?
Si vous avez opté pour un faux Pass et souhaitez finalement vous faire vacciner, pour une raison quelconque, sachez que c’est possible depuis septembre 2021. Lorsqu’un patient avoue être muni d’un certificat falsifié, les soignants lui proposent généralement la vaccination avec si besoin une procédure permettant d’annuler le faux Pass pour démarrer un schéma vaccinal en recommençant du début.
De même, une personne victime d’usurpation peut effectuer un signalement via l’application TousAntiCovid. Son Pass sera désactivé, et une nouvelle attestation de vaccination sera générée.
En décembre 2021, le ministre de la Santé Olivier Véran a aussi annoncé son intention de mettre en place un » système de repentis « pour que » quelqu’un qui bénéficierait d’un faux document puisse se mettre en règle et qu’il y ait abandon de poursuites « .
Le gouvernement annonce l’annulation de 300 000 faux Pass Sanitaires
Le 2 février 2022, sur le plateau de BFM TV, le ministre de la Santé Olivier Véran a annoncé l’annulation imminente de 300 000 faux Pass Sanitaires.
Une large part de ces faux Pass ont été créés dans les systèmes informatiques de l’Assurance maladie suite au piratage de comptes de professionnels de santé. En effet, de nombreux soignants et autres pharmaciens ont été pris pour cible par des hackers afin de générer des schémas vaccinaux fallacieux depuis leurs comptes.
Créés sur demande, les faux documents ainsi fabriqués sont vendus en ligne, par le biais des réseaux sociaux ou des marchés du Dark Web pour quelques centaines d’euros. Ils permettent de profiter des avantages du Pass sans pour autant se vacciner. En décembre 2020, plus de 50 000 faux Pass ont été créés par le biais du compte piraté d’un infirmier nantais.
Devant les caméras, Olivier Véran a ainsi annoncé : « il y a 300.000 personnes qui vont se réveiller un matin, qui vont présenter leur faux pass et qui vont se retrouver embêtées car elles n’en auront plus « . Une première vague d’annulation débutera à partir de ce mois de février 2022.
L’Assurance maladie va annuler les faux schémas de vaccination, afin de mettre ces Pass frauduleux hors service. Toutefois, il sera nécessaire de distinguer les individus véritablement vaccinés et liés au compte piraté d’un professionnel de santé. C’est là que réside la difficulté.
En menant des enquêtes pour remonter le fil des piratages, les autorités sont en mesure d’identifier les acheteurs. Ces derniers peuvent être retrouvés plusieurs mois après la transaction. Rappelons que la détention d’un faux Pass peut être punie de trois ans de prison et 45 000 euros d’amende.
Conclusion
Cette enquête révèle l’envergure du marché du faux Pass Sanitaire / Vaccinal, en France comme à l’étranger. Si les autorités parviennent à identifier et à démanteler des réseaux, de nombreux trafiquants agissent en réalité en toute discrétion et ne prennent que très peu de risques.
Il est difficile de mesurer le nombre exact de faux Pass en circulation, mais le nombre de 182 000 annoncé par le ministère de l’Intérieur en décembre 2021 est vraisemblablement très en dessous de la réalité…
Pour l’heure, le gouvernement ne semble pas en mesure d’endiguer ce phénomène. Il est impossible de distinguer un vrai Pass d’un faux, et le système de clé privée empêche la désactivation et la révocation des faux Pass identifiés.
Le » blacklisting » ou mise sur liste noire sur l’appli TousAntiCovid est actuellement le seul recours des autorités. Il est toutefois possible que de nouveaux dispositifs soient mis en place dans un avenir proche.
Quoi qu’il en soit, la prolifération des faux Pass démontre que la contrainte n’est pas la bonne approche pour convaincre les Français de se vacciner contre le Covid-19. Les citoyens trouveront toujours un moyen de contourner cette obligation, et des soignants les y aideront par conviction ou par pur intérêt financier.
Pour parvenir à l’objectif de vacciner 100% de la population, la seule vraie solution semble être de démontrer aux Français que les vaccins disponibles sont suffisamment efficaces contre la transmission et la contamination du virus et de ses variants, et sans risque d’effets secondaires y compris sur le long terme.
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