Donald Trump et Robert F. Kennedy Jr. accusent le Tylenol de provoquer l’autisme, mais les experts réfutent cette affirmation avec des études.
Le 22 septembre 2025, à la Maison-Blanche, une conférence de presse ordinaire bascule dans la controverse. Sur l’estrade, Donald Trump a martelé « N’en prenez pas ! N’en prenez pas ! ». Il cible le Tylenol, connu sous le nom d’acétaminophène ou de paracétamol, et l’associe à une hausse des cas d’autisme.
Tylenol et risque d’autisme, le vrai du faux
Donald Trump affirme que la consommation de Tylenol pendant la grossesse favoriserait la transmission de l’autisme aux enfants. Dans le même souffle, il va jusqu’à déconseiller certains vaccins aux jeunes parents.
L’influence de Robert F. Kennedy Jr. se fait sentir, même en son absence. Connu pour ses positions anti-vaccinales et sa méfiance envers l’industrie pharmaceutique, il nourrit un discours qui résonne fortement dans l’opinion.
Ces derniers mois, Kennedy Jr. a multiplié les interventions, répétant que « tous les vaccins sont dangereux », malgré le consensus scientifique. En juillet, lors d’une audition au Congrès, il avait même promis de dévoiler « d’ici septembre » les véritables causes de l’autisme.
Trump s’appuie aussi sur une étude publiée en août par des chercheurs du Mount Sinai, sous la direction d’un professeur de Harvard. Basée sur des données observationnelles, elle suggère une possible corrélation entre l’usage de Tylenol pendant la grossesse et un risque accru d’autisme chez l’enfant.
Mais les auteurs insistent sur la prudence : aucun lien de causalité direct n’a été établi. Cette nuance disparaît pourtant dans le discours présidentiel, qui transforme une hypothèse fragile en vérité affirmée.
La riposte scientifique
Dès le lendemain, la communauté médicale réagit fermement. La Dre Valérie Courchesne, neuropsychologue à l’Université de Montréal, tranche : « Non, vraiment pas. »
Elle rappelle une étude majeure publiée dans le Journal of the American Medical Association (JAMA), menée auprès de 80 000 femmes enceintes. Les résultats montrent l’absence de lien entre le Tylenol et l’autisme, sans effet dose-dépendant.
Le Dr Laurent Mottron, titulaire de la Chaire de recherche en neurosciences cognitives de l’autisme à la même université, apporte un éclairage complémentaire. Selon lui, 93 % des cas relèvent d’un autisme familial et héréditaire, contre seulement 7 % pour les formes syndromiques, d’origine génétique rare.
« Quand un enfant est autiste, la probabilité grimpe à un sur quatre pour les suivants, puis à un sur deux », explique-t-il. Cette transmission, observée partout dans le monde, rend peu crédible l’hypothèse d’une cause environnementale comme le Tylenol, dont l’usage varie selon les régions.
Quant à l’augmentation des diagnostics, elle s’explique avant tout par l’évolution des critères du DSM-5 et par un dépistage désormais étendu aux formes plus légères du spectre. Autrefois limité aux cas sévères, il concerne aujourd’hui l’ensemble des enfants, ce qui gonfle mécaniquement les statistiques.
Conséquences sur les marchés pharmaceutiques
À la suite des déclarations de Donald Trump sur un prétendu lien entre le Tylenol et l’autisme, les fabricants asiatiques d’acétaminophène subissent une forte correction boursière. En Chine, Zhejiang Cheng Yi Pharmaceutical recule de 6 %, Anhui Fengyuan de 5 %.
Shanxi Zhendong et Hunan Er Kang cèdent entre 2,5 et 4 %. À Hong Kong, Jiangsu Hengrui et WuXi AppTec perdent 4 %. En Inde, Dr Reddy’s et Sun Pharmaceutical limitent le repli à moins de 1 %, tout comme Takeda au Japon (-0,5 %).
Cette nervosité suit la chute de 7,5 % du titre de Kenvue Inc., fabricant américain du Tylenol. Les investisseurs redoutent un boycott des consommateurs, amplifié par l’avertissement présidentiel.
Trump met en avant une alternative, la leucovorine, dérivé d’acide folique recommandé contre les anomalies du tube neural. Mais la Dre Courchesne rappelle que si l’acide folique protège du spinabifida, il n’influe pas sur le développement neurocognitif lié à l’autisme.
Kenvue communique qu’aucun lien n’existe entre le Tylenol et l’autisme, une conclusion soutenue par des décennies de recherche. Les associations, comme l’Autism Society, dénoncent pour leur part une polémique qui stigmatise inutilement les familles et détourne le débat des priorités réelles : inclusion et soutien précoce.
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