La Chine se sert du Big Data pour surveiller et évaluer ses citoyens, à travers un système de crédit social qui sera déployé à l’échelle mondiale en 2014. Le scientifique politique Sebastian Heilmann craint que cette exploitation du Big Data n’accélère le développement économique et social de la Chine et représente une menace pour la démocratie et le capitalisme occidentaux.
En 2014, la Chine dévoilait son projet de système de « crédit social », visant à évaluer et à surveiller les citoyens grâce au Big Data. Tous les déplacements, transactions, appels téléphoniques et faits et gestes des citoyens seront collectés sous la forme de données pour attribuer une note à chaque individu. En fonction de cette note, les citoyens seront récompensés ou punis en ayant accès à plus ou moins de privilèges dans la société. Par exemple, les personnes mal notées pourront se voir refuser un crédit à la banque ou même interdire un trajet en avion.
Déjà déployé dans plusieurs villes de Chine, ce système de crédit social sera instauré dans l’ensemble du pays en 2020. En termes de respect de la vie privée et de la confidentialité, cet usage de la technologie moderne digne du roman 1984 de Georges Orwell a de quoi faire frémir les Occidentaux.
Une dystopie plus effrayante que 1984
Toutefois, selon le scientifique politique allemand Sebastian Heilmann, ce système dépasse de loin toutes les dystopies décrites dans la littérature et pourrait représenter une grave menace pour l’Occident sur le plan économique et social, et plus généralement pour la démocratie.
Selon lui, le crédit social basé sur le Big Data va permettre à la Chine d’embrasser pleinement les idéaux de discipline et d’obéissance fantasmés par Lénine en son temps. Le président du Mercator Insitute for China Studies estime que ce système ouvre de nouvelles perspectives en termes de régulation de l’économie et du marché, mais aussi de la société.
Le Big Data va permettre au gouvernement chinois de surveiller les entreprises et les citoyens en temps réel, en permanence. C’est la raison pour laquelle ce système dépasse les pires cauchemars de Georges Orwell.
La Chine veut faire revivre le socialisme grâce au Big Data
Toujours d’après Heilmann, le crédit social va permettre au gouvernement d’être plus efficace, et va rendre le modèle de développement chinois plus redoutable à l’échelle mondiale. La Chine va pouvoir s’émanciper pleinement de la démocratie et de l’économie de marché de l’Occident.
Les intérêts commerciaux entraîneront le développement d’un tel système à l’échelle mondiale, avec l’export des technologies de sécurité et de surveillance de la Chine. La Chine va pouvoir adapter le socialisme au 21ème siècle grâce au Big Data, et s’en servir comme argument pour appuyer ses critiques au sujet du capitalisme. Un modèle économique en « crise terminale » selon ses dires.
Vers une compétition des systèmes économiques et sociaux
S’en suivra sans aucun doute une compétition des systèmes à l’internationale. Si une nouvelle crise économique survient en Europe ou aux Etats-Unis, cela donnera davantage de crédit au système chinois.
Cette compétition des systèmes, l’Occident risque de la perdre à cause de sa négligence des nouvelles technologies. Le spécialiste estime que les démocraties occidentales ont largement sous-estimé le pouvoir du Big Data, et perçoivent bien souvent la technologie numérique comme un supplément alors que le gouvernement chinois y voit une force transformatrice.
C’est la raison pour laquelle la Chine a pris une longueur d’avance dans l’utilisation du Big Data à des fins politiques.Pour éviter que la démocratie et le capitalisme libéral ne finissent par paraître ringards et obsolètes aux yeux du monde entier, il est très important que l’Europe et les Etats-Unis rattrapent ce retard. Rappelons qu’Emmanuel Macron a récemment déclaré que le Big Data est sa priorité pour 2018.
- Partager l'article :