Initialement conçu pour trouver ses clés égarées ou d’autres objets, l’Apple AirTag est détourné de son utilisation première. Le gadget est devenu un outil d’espionnage et de harcèlement. Face aux nombreux signalements et plaintes à son encontre, Apple tente de rectifier la situation en proposant plusieurs solutions, dont la mise en place d’une norme en collaboration avec Google.
Depuis le lancement de l’AirTag en 2021, Apple ne tarit pas d’éloges sur son gadget. L’Apple AirTag est le dispositif idéal pour tout retrouver : portefeuille, clés, voiture, télécommande, etc. Lorsqu’il est accroché sur un objet, son utilisateur le géolocalise sur son iPhone en temps réel. Les utilisateurs ne passent plus autant de temps à chercher leurs clés grâce à ce dispositif. Bien que la technologie soit pratique, elle a été détournée de son utilisation. Des challenges sur Tik Tok montrent des jeunes qui placent le dispositif dans la poche de leurs amis pour les retrouver facilement à une fête. Pourtant, certains s’en servent à des fins malveillantes : harcèlement, vol, etc. En quelques mois, les AirTags sont devenus la cible de nombreuses critiques poussant Apple à réagir.
Apple AirTag : l’accessoire ultime pour retrouver un objet perdu rapidement
Selon une enquête Ipsos pour Wistiki, les Français dépensent environ 2 h 30 mn chaque mois pour trouver leurs clés de voiture, téléphones et autres objets du quotidien. Ce temps équivaut à deux mois à l’échelle d’une vie. D’après Wistiki, si l’on valorise ce temps perdu en taux horaire SMIC, il correspond à environ 11,5 milliards d’euros chaque année.
En somme, trouver ses clés chaque matin dépense de l’énergie, du temps. De plus, ce geste est source de stress puisque la personne craint d’arriver en retard à son travail. 12% des Français déclarent avoir déjà été en retard au travail à cause d’un objet égaré. Par ailleurs, 4% ont raté leur vol ou leur train. Par ailleurs, la perte d’un objet peut être source de tension dans un couple sur trois.
Description technique de l’AirTag
Les entreprises de la tech ont bien réalisé l’ampleur du problème et des besoins des consommateurs. Les rumeurs allaient de bon train chez Apple. La marque à la pomme développe une balise Bluetooth pour retrouver facilement les objets perdus. Après plusieurs rumeurs, le lancement de l’Apple Airtag est finalement officialisé au mois d’avril 2021.
L’Apple Airtag est un objet fin que son propriétaire peut accrocher à tous les objets qui se perdent facilement : carte bancaire, doudou, téléphone, porte clé, télécommande, etc. Contrairement aux autres objets connectés, l’Airtag fonctionne sans alimentation. Il est équipé d’une pile standard ayant une autonomie de plus d’un an, dont il est possible de remplacer. Un AirTag ne craint pas la pluie puisqu’il présente une résistance IP67.
Ce nouvel objet ne représente pas une révolution. Un autre acteur commercialise déjà le même outil depuis quelques années, à savoir Tile. Il suffit de l’accrocher à un objet. Grâce à son émetteur Bluetooth, l’utilisateur peut le repérer à l’aide de son smartphone.
Fonctionnement de la localisation
AirTag fonctionne grâce à l’application Find My permettant de géolocaliser des amis ou des objets. Pour cela, Apple utilise un subtil stratagème. Lorsqu’un objet de la marque est déclaré perdu, il va tenter de se connecter à tous les appareils Apple aux alentours afin de signaler sa position à son propriétaire.
L’objet demeure ainsi géolocalisable même s’il se trouve à des kilomètres de son utilisateur. Il utilise anonymement le réseau d’un tiers pour communiquer sa position. Ceci s’effectue de manière chiffrée.
Prenons l’exemple d’une personne ayant oublié ses clés chez des amis. L’AirTag continue d’émettre grâce aux appareils connectés de ces amis. Le propriétaire peut ainsi connaître la position précise en temps réel de ses clés.
Pour trouver l’objet au centimètre près, Apple s’appuie sur la puce U1 dont les iPhone en sont déjà équipés. Cette puce permet la géolocalisation d’un objet avec une grande précision grâce à la fréquence « à bande ultra-large ».
Les accessoires Apple AirTag
Les AirTags débarquent sur le marché sous la forme de gamme. Ils sont vendus avec des accessoires pour les accrocher. Cela peut aller d’un simple porte clé d’une trentaine d’euros à des versions plus éclectiques de plusieurs centaines d’euros.
À la sortie de son AirTag, Apple avait anticipé les questions autour de la vie privée. Selon les déclarations de la marque à l’époque, cet objet ne peut pas suivre une personne à son insu. Pour cause, dès que l’appareil s’éloigne de son propriétaire, il émet un son facilement reconnaissable.
Apple AirTag : les dérives de son utilisation
L’utilité du dispositif est avérée, notamment pour les têtes en l’air. Trouver ses clés pour se rendre à son travail devient plus facile. Son utilisation dans les bagages en soute a aussi fait parler de lui. Les voyageurs retrouvent leur bagage plus vite que la compagnie aérienne.
Lutter contre le vol de voiture à New York
En avril 2023, le maire de New York annonce la distribution d’au moins 500 AirTags pour protéger les citoyens. Il entend baisser le nombre de vols de voitures qui a explosé dans la ville. La force de l’ordre newyorkais ne tarit pas d’éloges sur le petit d’accessoire d’Apple. Elle affirme que le dispositif permet de retrouver rapidement le véhicule en cas de vol.
Dans un autre contexte, des mères de famille américaines ne cachent pas qu’elles équipent leur enfant de ce gadget. Sur les réseaux sociaux, elles déclarent que l’AirTag fournit la position en temps réel de leur enfant.
Des plaintes pour vol de véhicule au Canada
Pourtant, malgré ces avantages, le dispositif a fait l’objet de nombreuses plaintes depuis sa sortie. C’est le cas d’un service de police canadien dans la région de York. Les voleurs les accrochent au véhicule d’un conducteur. Ensuite, il ne reste plus qu’à suivre la position du dispositif. Une femme a porté plainte après que son iPhone a été alerté de la présence d’un AirTag dans son véhicule. La police de York déclare néanmoins que ces incidents sont rares. Sur les 2000 vols recensés dans la région, 5 d’entre eux seulement impliquent des AirTags.
Retrouver l’adresse d’une personne en Allemagne
En Allemagne, un militant a divulgué l’emplacement d’un organisme d’État suite à l’envoi d’un courrier contenant un AirTag. Par ailleurs, certaines personnes s’en servent afin de suivre l’itinéraire de leur courrier. La pratique, bien que critiquable, est plus ou moins légale selon le pays. D’autres peuvent l’utiliser pour trouver le lieu de résidence de quelqu’un. Prenons l’exemple d’une personne qui souhaite garder anonyme son adresse, elle fournit ainsi une boîte postale pour recevoir ses courriers. Un courrier contenant un AirTag peut révéler ce lieu.
De nombreuses plaintes contre les Apple AirTags pour harcèlement aux États-Unis
Les cas plus sérieux portent sur le harcèlement et l’espionnage des personnes. En juin 2022, une Américaine d’Indianapolis a renversé son compagnon lorsqu’elle l’a surpris discutant avec une autre femme dans un bar. Le rapport de la police révèle que cette femme se servait d’un outil de pistage comme l’AirTag pour trouver son conjoint.
Plusieurs plaintes ont été enregistrées aux États-Unis depuis la commercialisation de l’AirTag en 2021. Le média Vice révèle qu’au moins 150 rapports de police font état d’un harcèlement des femmes à travers ce dispositif.
La chaîne CNN rapporte la plainte déposée par deux femmes contre Apple. Ces dernières ont déclaré avoir été harcelées et traquées avec des AirTags par leurs anciens compagnons. Dans la majorité des cas, les harceleurs placent le petit objet dans la voiture de la victime.
Des dérives constatées également en France
L’AirTag d’Apple fait aussi parler de lui sur les réseaux sociaux en France. En juin 2023, un tweet alertant les Parisiennes sur les AirTag suscite de nombreuses réactions sur Twitter. Des témoignages similaires émergent sur les réseaux. Un officier de la gendarmerie réagit sur le même tweet en encourageant les victimes à ne pas jeter ni enlever la pile du dispositif. Il les invite à signaler l’infraction à la police et à ramener l’objet pour remonter jusqu’à son propriétaire.
En France, l’article 226-1 du Code pénal est clair, porter atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui est condamnable d’un an d’emprisonnement ainsi que de 45 000 euros d’amende.
Quelles sont les mesures prises par Apple face à ces dérives ?
Rappelons que les dispositifs comme l’AirTag existent depuis des décennies, qu’ils soient légaux ou illégaux. D’ailleurs, Tile avait déjà lancé un objet similaire dès 2013 bien que leur produit n’offre pas une plus grande couverture comme les AirTags grâce aux millions d’utilisateurs d’iPhone.
Un AirTag a besoin d’une connexion à un Apple ID. Pourtant, la création de ce compte exige un numéro de carte bleu et un vrai nom. En cas de signalement d’un harcèlement, Apple peut fournir les données sur le propriétaire de l’objet.
Malgré tout, cette technologie, bien que pratique, est utilisée à des fins de cyberharcèlement et d’espionnage illégal. Pour remédier à la situation, Apple tente d’apporter une solution. Si un AirTag est glissé à l’insu d’une personne dans sa voiture ou son sac à main, elle reçoit un avertissement sur son téléphone.
Cette solution soulève pourtant la question de l’écosystème fermé d’Apple. Si la victime n’utilise pas un smartphone de la marque, elle ne peut donc pas recevoir l’alerte. Les utilisateurs d’Android doivent donc télécharger une application pour détecter la présence d’un AirTag.
La mise en place d’une norme
Face à l’avalanche de critiques sur ses AirTags, Apple collabore avec d’autres fabricants comme Google pour établir une norme. Cette norme prévoit :
- l’émission d’un son audible sur tous les dispositifs de suivi afin d’alerter les personnes qui se trouvent à proximité lorsqu’ils se trouvent loin de leur propriétaire ;
- la possibilité de détection par tous les smartphones iOS et Android ;
- la demande de consentement avant l’activation de la fonctionnalité du réseau communautaire ;
- la communication des informations claires sur le fonctionnement du dispositif de suivi.
L’objectif de cette norme, selon le communiqué d’Apple, est d’éviter le suivi indésirable d’autres personnes.
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